Alors que les centrales à charbon vieillissantes de la compagnie publique Eskom ne parviennent plus à répondre à la demande, les coupures planifiées d’électricité plombent l’économie sud-africaine. Mais la situation devrait s’améliorer progressivement, grâce à des investissements colossaux dans les énergies renouvelables.
Les coupures d’électricité ont causé une réduction du produit intérieur brut (PIB) de l’Afrique du Sud allant de 1 à 1,3% par an, depuis que la compagnie publique de l’électricité Eskom a commencé à procéder à des délestages par roulement en 2007 pour éviter un effondrement total du réseau, selon un rapport publié le 22 mars dernier par la Chambre africaine de l’énergie.
Le rapport souligne également que la taille de l’économie sud-africaine aurait pu être au moins 17 % plus importante qu’elle ne l’est aujourd’hui, si les délestages n’avaient pas été mis en œuvre.
Les économistes locaux estiment en effet que les coupures planifiées d’électricité coûtent entre 85 et 230 millions de dollars par jour en perte de production, et sapent les efforts pour réduire le chômage endémique qui touche plus de 32% de la population active.
Centenaire cette année, Eskom qui fournit plus de 90% de l’électricité du pays, est incapable à répondre à la demande, avec ses centrales à charbon vieillissantes. La compagnie qui traîne des dettes de 23 milliards de dollars, en raison plusieurs décennies de mauvaise gestion et de corruption, ne parvient plus à entretenir ses centrales existantes. Conséquence : des délestages par roulement durant 205 jours ont été enregistrés en 2022.
S’éloigner du « tout charbon »
Intitulé « The state of South African energy 2023 », le rapport précise d’autre part que la première puissance industrielle en Afrique tire 80% de son électricité du charbon. Sur le court et le moyen terme, la part de ce combustible fossile dans le mix énergétique du pays ne devrait pas changer significativement. Cette part devrait baisser légèrement, à 75% en 2025 et à 65% en 2030. La production d’électricité à partir du charbon devrait ensuite continuer à diminuer progressivement pour se situer à 25 % seulement du total des capacités installées en 2045.
Parallèlement, la part des énergies renouvelables et du gaz naturel, qui est considéré comme un combustible de transition, devrait croître. Les parts du gaz naturel, de l’éolien terrestre et du solaire devraient atteindre respectivement de 5 %, 17 % et 7 % en 2031. En 2045, ces mêmes sources d’énergie devraient représenter 65% de l’électricité produite dans le pays.
Par ailleurs, le rapport indique que le système avant-gardiste de vente aux enchères des énergies renouvelables lancé le gouvernement pour attirer les investisseurs privés a connu un succès retentissant. Entre 2010 et 2015, quatre appels d’offres ont permis d’attribuer 102 projets d’une capacité globale de 6 gigawatts (GW) à des entreprises privées dans le cadre de ce système baptisé « Programme d’approvisionnement indépendant en énergie renouvelable » (Renewable Energy Independent Power Producer Procurement Program/REIPPPP).
Des ressources renouvelables abondantes
Après avoir été abandonné au prétexte que les énergies renouvelables sont très coûteuses, ce programme a été relancé en 2019. Deux appels d’offres supplémentaires lancés ces dernières années ont permis d’attribuer plusieurs dizaines de projets éoliens et solaires qui devraient entrer en production en 2024 et en 2025.
En dépit des avancées réalisées grâce au programme REIPPPP, qui totalise des capacités d’environ 9,7 GW, l’Afrique du Sud n’exploite encore qu’une infime partie de ses abondantes ressources renouvelables. Ce pays d’une superficie de 1,2 million de kilomètres carrés dispose d’un potentiel photovoltaïque de 422,4 térawattheures (TWh). La partie la plus occidentale du pays présente des niveaux de rayonnement solaire très élevés, allant de 2100 kWh à plus de 2300 kWh par mètre carré.
L’énergie éolienne pourrait, quant à elle, être produite sur 80% de la superficie du pays, avec un potentiel de 20 GW sur les sites ayant un facteur de charge de 20 % et 10 GW sur les sites disposant d’un facteur de charge de 30%.
La Chambre africaine de l’énergie rappelle dans ce cadre que gouvernement sud-africain a dévoilé, en marge de la Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP27) tenue en novembre 2022 en Egypte, un « Plan d’investissement dans la transition énergétique juste » (Just Energy Transition Investment Plan/ JET IP), qui chiffre les besoins financiers à 98,7 milliards de dollars sur cinq ans. Les pays développés s’étaient déjà engagés l’an dernier à contribuer à ce plan à hauteur de 8,5 milliards de dollars alors que les engagements du secteur privé s’élèvent déjà à 33 milliards et ceux du secteur public se chiffrent à 10 milliards du secteur public.
Source : Agence Ecofin