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Le rapport souligne que les mesures répressives contre les acteurs impliqués dans l’exploitation artisanale de l’or accentuent souvent la mainmise des réseaux du crime organisé sur les opérations d’extraction aurifère et les chaînes d’approvisionnement.

La formalisation de l’exploitation minière artisanale et à petite échelle (EMAPE) de l’or en Afrique de l’Ouest représente la seule solution viable pour libérer ce secteur de la mainmise des réseaux du crime organisé et renforcer son rôle de facteur de stabilisation de larges zones dans lesquelles la présence de l’État est limitée, selon un rapport publié le 7 février 2024 par la Commission de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).

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Intitulé « Leçons tirées des expériences régionales de l’Afrique de l’Ouest dans le secteur de l’or », le rapport indique que l’artisanat minier représente une source importante de moyens de subsistance dans la région, et en même temps une activité informelle vulnérable à l’exploitation par des acteurs criminels et conflictuels.

Les réseaux du crime organisé infiltrent le secteur et exploitent son caractère informel pour la contrebande d’or, le blanchiment d’argent et la violence. Les groupes armés non étatiques au Sahel et au Nigeria taxent les marchandises, y compris l’or, comme source de financement. Certains groupes contrôlent et profitent également des sites l’artisanat minier au Sahel.

Le secteur joue cependant un rôle central dans les économies politiques et les dynamiques de stabilité dans la région du Sahel, en détournant une partie de la population de toute implication dans des formes de criminalité plus néfastes ou plus violentes, notamment dans les zones qui restent largement hors de portée des autorités nationales.

Ce rôle est particulièrement crucial dans un contexte où les jeunes subissent de plein fouet le chômage et le sous-emploi et alors que d’autres moyens de subsistance traditionnels, en particulier l’agriculture, sont menacés par le changement climatique.

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Mais l’utilisation grandissante d’explosifs et de produits chimiques, en particulier le mercure et le cyanure, dans des opérations minières constitue désormais une menace majeure dans la région non seulement en raison des problèmes de sécurité sur les sites miniers, mais aussi pour les dynamiques d’instabilité à plus grande échelle. D’autant plus que les explosifs utilisés dans l’exploitation minière pourraient finir entre les mains de groupes extrémistes violents.

Sur un autre plan, les femmes sont confrontées à la discrimination et à la marginalisation dans l’artisanat minier bien qu’elles représentent 20 à 50 % de la main-d’œuvre dans le secteur. Par exemple, le déni des droits fonciers des femmes persiste malgré le développement de cadres juridiques qui élargissent leurs droits de propriété. Cette situation est exacerbée par la présence d’acteurs criminels, qui perpétuent les inégalités de genre traditionnelles et sociétales qui dénigrent et dépriorisent les femmes.

Des mesures de répression contre-productives

Le rapport souligne d’autre part que les efforts antérieurs visant à lutter contre l’artisanat minier de l’or informel ou illégal en Afrique de l’Ouest ont eu tendance à impliquer des mesures de répression contre les acteurs du secteur. Cependant, des recherches ont montré que, plutôt que de réduire la criminalité, ces mesures répressives accentuent souvent la fragilité des mineurs artisanaux et la mainmise criminelle sur les opérations d’extraction aurifère et les chaînes d’approvisionnement. En conséquence, la nécessité de stratégies alternatives est de plus en plus reconnue, et les mesures de soutien qui introduisent l’artisanat minier de l’or dans l’économie régulière représentent la solution la plus viable pour réduire l’emprise des acteurs criminels et conflictuels sur le secteur.

Dans ce cadre, le rapport identifie plusieurs éléments à prendre en compte dans la formulation d’une approche efficace pour soutenir la formalisation de l’artisanat minier, en s’appuyant sur les bonnes pratiques régionales émergentes.

L’intérêt devrait d’abord se porter sur la facilitation de l’accès des mineurs aux terres et aux gisements d’or à travers la création de couloirs miniers ou d’autres zones désignées pour l’activité. Les couloirs miniers ont été jusqu’à présent un élément clé de l’approche suivie par la Mauritanie, qui a connu quelques succès. Pour réussir, la facilitation de l’accès aux terres doit aligner les intérêts des mineurs industriels et des parties prenantes de l’artisanat minier, leur permettant de coexister aussi harmonieusement que possible.

Les pays d’Afrique de l’Ouest devraient aussi veiller à la création de coopératives pour permettre aux mineurs artisanaux de mettre en commun leurs ressources et d’accéder collectivement au financement. Ces coopératives pourraient également contribuer à formaliser les chaînes d’approvisionnement en or et à rendre plus réalisable la garantie de la transparence et de la responsabilité dans le commerce du métal précieux.

Une approche de formalisation holistique doit par ailleurs intégrer des politiques inclusives en matière de genre qui abordent les défis uniques auxquels sont confrontées les femmes dans le secteur de l’artisanat minier, la mise en place de centres de services décentralisés tels que des centres de traitement et des comptoirs d’achat du minerai, le renforcement des organismes de réglementation nationaux et l’amélioration de la coordination régionale pour assurer une surveillance cohérente et efficace du secteur.

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