La divulgation des véritables propriétaires des mines et projets pétrogaziers est une exigence de l’ITIE, destinée à réduire le risque de corruption et de fraude dans le secteur extractif.
Au Sénégal, le président Bassirou Diomaye Faye veut divulguer la propriété effective des entreprises extractives. Cette mesure annoncée dans son discours à la nation mercredi 3 avril est conforme à une directive de l’Initiative pour la transparence des industries extractives (ITIE) qui exige aux pays membres de dévoiler l’identité des véritables propriétaires des mines.
Selon l’ITIE, l’anonymat des véritables propriétaires des entreprises extractives, appelés « bénéficiaires effectifs », accroit le risque de corruption et de conflits d’intérêts dans le secteur. Au Sénégal, un décret de 2020 définit un bénéficiaire effectif comme tout individu détenant une participation de 2 % ou plus dans une société extractive.
Dissimuler l’identité de ces derniers ferait perdre de l’argent aux pays riches en ressources naturelles, comme l’indique un rapport de l’ONG internationale ONE. Elle évalue à 1 000 milliards de dollars chaque année depuis 2011, les sommes perdues par les pays en développement à la suite de transactions frauduleuses ou illégales, dont beaucoup concernent des sociétés anonymes.
En dehors de la propriété effective, l’autre priorité du président élu en mars dernier est l’audit du secteur minier, gazier et pétrolier. Le nouveau chef d’État a aussi annoncé une protection soutenue du contenu local, sans donner d’autres détails sur la mise en œuvre de ces différentes initiatives. Il faut souligner que la réalisation d’audits au niveau des contrats miniers peut souvent déboucher sur la renégociation des accords liant les entreprises aux États, comme ce fut récemment le cas en RDC avec le contrat « mines contre infrastructures ».
Au Mali, l’audit commandé par le président Assimi Goïta a donné lieu en 2023 à l’adoption d’un nouveau code minier qui augmente la participation de l’État dans les mines, avec une hausse potentielle de 500 milliards FCFA des revenus miniers. Ces initiatives peuvent néanmoins créer des tensions avec les investisseurs étrangers et réduire l’attractivité du pays.
« Je voudrais dire à tous nos partenaires privés qu’ils sont les bienvenus au Sénégal. Conformément aux lois et règlements en vigueur, les droits de l’investisseur seront toujours protégés, de même que les intérêts de l’État et des populations », a donc tenté de rassurer M. Diomaye Faye.
Pour rappel, le secteur minier sénégalais est dominé par l’exploitation de l’or et des phosphates. Les deux mines d’or du pays appartiennent à deux sociétés basées au Royaume-Uni (Endeavour Mining) et en Australie (Resolute Mining), alors que l’exploitation des phosphates concerne des sociétés à capitaux sénégalais, asiatiques et européens. Notons que le secteur extractif dans son ensemble (Mines et Hydrocarbures) représente 4,5 % du PIB en 2022 et environ 7 % des recettes de l’État.
Emiliano Tossou
Source : Agence Ecofin