Si la RDC assure 70 % de l’offre mondiale de cobalt, l’exploitation artisanale et à petite échelle dans le pays peut être considérée comme le deuxième producteur mondial du métal, car elle représente 15 à 30 % de l’offre. L’activité présente néanmoins des risques qui peuvent être fatals aux mineurs.
Depuis quelques jours, une vidéo amateur montrant des mineurs échappant à un éboulement de terrain sur un site d’exploitation artisanale en RDC, est devenue virale. Relayée par plusieurs médias internationaux comme un sauvetage « miraculeux », elle montre au total neuf hommes qui ont réussi à s’extraire des décombres de ce site artisanal du Sud-Kivu le week-end dernier.
Cette vidéo constitue un énième rappel du long chemin que les autorités locales doivent encore parcourir pour rendre cette activité plus sûre pour leurs concitoyens. Les scènes comme celle présentée dans la vidéo sont en effet malheureusement fréquentes en RDC, où la pauvreté et le chômage poussent des jeunes, des femmes et même des enfants à se lancer dans l’exploitation artisanale du cobalt et du cuivre principalement, mais aussi de diamants, d’or et d’étain.
Plusieurs millions de Congolais dépendent de cette activité pour leurs subsistances, y compris des enfants (environ 40 000 selon une ancienne étude de l’UNICEF de 2014). Le phénomène a pris une ampleur considérable ces dernières années, avec l’explosion de la demande mondiale de cobalt et de cuivre et l’envolée des prix et ceci, en dépit des risques de sécurité qui y sont liés.
La Radio Okapi, une station de radio gérée par les Nations Unies, a ainsi officiellement recensé 80 morts de mineurs entre juin 2015 et juin 2020 (et jusqu’à 250, selon une source officieuse citée dans un rapport du Forum économique mondial – WEF), sur le site artisanal de cobalt de Kasulo. Comme l’illustre la vidéo, les mineurs travaillent en effet sans équipements de protection et sur des sites qui ne respectent pas les normes de sécurité élémentaires pour un tunnel ou un puits minier.
Pour mettre fin à ces conditions de travail dangereuses, plusieurs projets ont été mis en place ces dernières années pour formaliser l’exploitation minière artisanale et à petite échelle (ASM). À titre d’exemple, la compagnie minière Chemaf, le négociant Trafigura, la coopérative d’ASM COMIAKOL et l’organisme à but non lucratif Pact ont lancé en janvier 2018 un projet de formalisation de l’ASM sur la concession de cobalt de Mutoshi.
En utilisant des machines d’excavation pour créer des fosses ouvertes peu profondes, les partenaires ont permis en moyenne à 3 500 mineurs de travailler sur le site de façon permanente pendant près de deux ans, pour environ 6 millions d’heures de travail, sans aucun accident mortel. Le projet a été suspendu en mars 2020 avec le début de la pandémie de Covid-19 et n’a pas repris depuis lors.
Mutoshi montre cependant l’une des voies à suivre pour rendre l’activité plus sûre et plus profitable aux mineurs, tout en garantissant l’approvisionnement mondial en métaux nécessaires à la transition énergétique. Les raisons pour mieux encadrer cette activité ne manquent pas, entre sa contribution de 15 à 30 % de l’offre mondiale de cobalt et les milliards perdus chaque année par Kinshasa du fait de l’exportation illégale des produits obtenus de cette manière vers les pays voisins.
Emiliano Tossou
Source : Agence Ecofin