Bien qu’il reste encore peu exploré, le continent détient déjà des parts considérables des réserves mondiales des minéraux critiques. De plus, la plupart des études géologiques y ont été menées avant que certains minéraux ne soient reconnus comme essentiels à la transition énergétique.
L’Afrique détient entre 20% et 90% des réserves mondiales de 11 minéraux nécessaires à la transition énergétique comme les métaux du groupe du platine, le cobalt, le chrome et le zircon, selon un rapport publié en novembre dernier par l’ONG Natural Resource Governance Institute (NRGI).
Intitulé « Triple win : How mining can benefit Africa’s citizens, their environment and the energy transition », ce rapport précise que le continent dispose de plus de 90% des réserves planétaires des métaux du groupe du platine (ruthénium, rhodium, palladium, osmium, iridium, platine et rhénium), qui sont notamment utilisés dans la fabrication des piles à combustible, des électrolyseurs nécessaires à la production de l’hydrogène vert et des catalyseurs automobiles.
L’Afrique abrite également 80% des réserves mondiales de phosphate nécessaire à la fabrication des cathodes des accumulateurs LFP (Lithium, Fer, Phosphate) et des engrais.
Elle détient aussi des parts importantes des réserves mondiales de neuf autres minéraux indispensables pour la fabrication des solutions de stockage d’énergie, des panneaux photovoltaïques, des pales d’éoliennes et de divers composants des véhicules électriques : le manganèse (55% des réserves mondiales), le cobalt (44%), l’ilménite (43%), l’yttrium (43%), le chrome (40%), le vanadium (30%), la bauxite (22%), le graphite (21%) et le zircon (20%).
Le rapport, qui révèle aussi que l’Afrique détient 19 % des réserves mondiales de métaux nécessaires à la fabrication d’un véhicule électrique standard alimenté par une batterie, souligne que le continent est encore peu exploré puisqu’il possède la plus faible concentration de richesses minérales connues dans le monde.
Une exploration plus poussée pourrait ainsi révéler de nouveaux gisements de minéraux critiques. Mais même dans l’état actuel des choses, il est indéniable que le continent joue déjà un rôle très important dans la réalisation des objectifs de réduction des émissions à l’échelle globale.
Natural Resource Governance Institute, qui milite pour l’amélioration de la gouvernance des ressources naturelles afin de promouvoir un développement durable et inclusif, précise cependant que la transition vers des systèmes énergétiques à faibles émissions à l’échelle mondiale d’ici 2050 ne doit pas répéter les erreurs qui ont caractérisé l’exploitation minière en Afrique dans le passé.
Les pays du continent et leurs citoyens n’ont pas jusqu’ici profité suffisamment de leurs ressources minérales. L’industrie minière a certes contribué à hauteur de 8 % aux recettes publiques totales dans les 15 pays du continent les plus dépendantes de cette activité, mais elle n’a généré que très peu d’opportunités pour les entreprises africaines dans les segments de la fourniture de services aux compagnies minières et des chaînes de valeur utilisant les minéraux. Entre outre, les activités minières ont accentué la pollution et la déforestation.
Des bénéfices sur trois fronts
Le rapport souligne dans ce cadre qu’une exploitation responsable des minéraux de la transition énergétique peut conduire à des bénéfices sur trois fronts : l’accélération de la transition énergétique ; l’amélioration de la croissance économique et du bien-être social en Afrique ; et la protection de la nature dans les zones d’exploitation.
Pour réaliser ces bénéfices, Natural Resource Governance Institute a identifié plusieurs pistes.
Il s’agit en premier lieu d’établir des zones interdites à l’exploitation minière regroupant notamment les sites du patrimoine mondial de l’UNESCO, les vastes étendues de forêts et les aires de précieuse biodiversité dans le cadre d’accords entre les gouvernements locaux, les bailleurs de fonds et les compagnies minières.
En second lieu, les bailleurs de fonds multilatéraux devraient soutenir les Etats et les compagnies minières en participant plus activement aux études géologiques, étant donné que le continent africain demeure peu exploré. D’autant plus que de nombreuses études géologiques y ont été menées avant que plusieurs minéraux ne soient reconnus comme essentiels à la transition énergétique.
Pour faire bénéficier davantage les Africains des richesses de leurs sous-sols, les pays développés et les bailleurs de fonds devraient par ailleurs encourager l’apparition d’une industrie locale dans la chaîne de valeur des véhicules électriques et des énergies renouvelables ainsi que l’émergence de fournisseurs locaux de compagnies minières pour une multitude de produits allant des camionnettes aux foreuses, en passant par les pièces de rechange, les services de restauration et la gestion des ressources humaines.
Dans ce chapitre, les compagnies minières étrangères et les bailleurs de fonds devraient investir dans des centres de formation, des universités et des activités de recherche et de développement pour assurer un transfert de technologies aux travailleurs locaux.
Les différents acteurs impliqués dans les chaînes de valeur des minéraux de la transition énergétique sont également appelés à se coordonner à l’échelle régionale pour partager les minerais et les infrastructures et mieux définir leurs besoins en biens et services.
Les bailleurs de fonds devraient également financer des projets d’énergies renouvelables pour fournir de l’électricité propre aux activités d’extraction, de transformation et de production locale.
Natural Resource Governance Institute estime cependant que cette recette visant à partager plus équitablement les fruits des richesses minières africaines ne réussira qu’en cas d’une importante amélioration des indicateurs de gouvernance, notant que 16% seulement des pays producteurs de minéraux critiques divulguent systématiquement tous les contrats miniers ou la plupart d’entre eux.
Source : Agence Ecofin