Le boom des véhicules électriques crée de nouvelles opportunités sur le marché du lithium. Si plusieurs pays africains s’activent pour en tirer profit comme l’explique un rapport d’Ecofin Pro consacré au sujet, prennent-ils en compte tous les risques comme la menace que peut représenter le sodium ?
Selon un nouveau rapport de BloombergNEF, le sodium devrait gagner progressivement en importance et pourrait à l’avenir atténuer les pénuries de lithium sur le marché des batteries pour véhicules électriques. Les auteurs du rapport prédisent que dans un scénario extrême, la croissance des batteries au sodium pourrait réduire la demande globale de lithium de 37 %, soit 1,4 million de tonnes d’ici à 2035.
Ce scénario extrême impliquerait que les mineurs de lithium ne parviennent pas à suivre le rythme de la consommation de la prochaine génération de batteries haut de gamme et que les risques de pénuries prolongées se concrétisent. Dans le scénario de base pris en compte par les analystes, le sodium devrait prendre des parts au segment le moins cher et le plus bas du marché automobile en Chine, et pourrait remplacer jusqu’à 272 000 tonnes de la demande de lithium en 2035 (7 %).
« Les batteries sodium-ion sont une technologie alternative qui peut relâcher la pression sur la chaîne d’approvisionnement complexe et croissante du lithium », ont écrit les auteurs du rapport, selon les détails relayés par Mining Weekly, expliquant que l’attrait du sodium est dû au fait qu’il est abondant dans les sels de roche et les saumures du monde entier.
Ils ont ajouté que malgré qu’il soit en retard par rapport aux autres minéraux, le lancement par la Chine de véhicules électriques bon marché utilisant des batteries au sodium pourrait changer la donne pour cette technologie.
Quels enseignements pour les pays africains ?
Pour les pays africains qui essaient de mieux se positionner sur la chaîne de valeur du lithium, ces prévisions de BloombergNEF sont porteuses de plusieurs leçons. D’un côté, l’évocation de potentiels risques de pénuries d’ici 2035 peut être vue comme un facteur susceptible d’entrainer des hausses supplémentaires de prix sur le marché du lithium. Pour les producteurs, cela pourrait alors se traduire par davantage de revenus.
Cependant, d’un autre côté, on pourrait se demander si les secteurs du lithium qui commencent à peine à se développer dans des pays comme la RDC, le Mali, le Ghana ou encore la Namibie, la Côte d’Ivoire, etc., seront assez matures pour tirer profit des éventuelles hausses de prix du lithium dans quelques années. Pour le moment, il faut rappeler que le Zimbabwe est encore le seul pays africain qui produit du lithium.
Aussi, si les batteries au sodium gagnent en popularité et leur adoption entraine une baisse des prix du lithium, quel effet cette situation pourrait-elle avoir sur les prévisions de rentabilités des projets de lithium en cours sur le continent africain ? La question se pose non seulement pour l’Afrique, mais pour l’ensemble du secteur et fait déjà couler beaucoup d’encre. « À l’avenir, je refuse d’acheter une seule étude d’une société d’analyse du lithium qui n’a pas une vision raisonnable et pragmatique de la batterie sodium-ion dans ses prévisions pour les véhicules électriques », déclarait dans un tweet en avril dernier George Heppel, directeur commercial de BASF SE pour les métaux des batteries.
Louis-Nino Kansoun
Source : Agence Ecofin