Selon une note de la banque UBS parue cette année, Pékin portera son contrôle sur l’offre mondiale de lithium à 32 % en 2025, contre 24 % en 2022. Une croissance liée notamment aux multiples projets africains dans lesquels les entreprises originaires de Chine ont investi ces dernières années.
Au Zimbabwe, la compagnie minière chinoise Sinomine Resource Group a annoncé cette semaine la mise en service d’une usine de concentré de spodumène. Dotée d’une capacité de production annuelle de 300 000 tonnes, il s’agit de la troisième installation du genre pilotée par des entreprises chinoises à entrer en production dans le pays d’Afrique australe depuis mai 2023.
En mai dernier, Chengxin Lithium Group a en effet mis en service un concentrateur de lithium doté de la même capacité annuelle, 300 000 tonnes, à sa mine Sabi Star dans l’est du pays. Début juillet, c’était au tour de Zhejiang Huayou Cobalt de lancer son usine dotée d’une capacité annuelle de 450 000 tonnes à la mine Arcadia.
Au total, une enveloppe de plus d’un milliard de dollars a été investie au cours des deux dernières années par les investisseurs originaires de l’empire du Milieu pour acheter et développer des projets de lithium au Zimbabwe. Tout en confortant sa position dominante dans la production de ce métal indispensable aux batteries de véhicules électriques, Pékin contribue à maintenir le rang du Zimbabwe comme premier producteur africain de lithium.
Dès l’année prochaine, Harare devrait cependant être rejoint par de nouveaux acteurs sur le continent, notamment le Mali qui lancera, au premier semestre 2024, sa première mine de lithium avec le concours, là aussi, du groupe chinois Ganfeng Lithium. Le projet Ewoyaa, piloté au Ghana par l’australien Atlantic Lithium avec le soutien de l’américain Piedmont Lithium, est l’une des rares futures mines de lithium africaines sans implication directe chinoise.
Dans la bataille mondiale en cours pour sécuriser l’approvisionnement en métaux stratégiques, la Chine est donc largement en avance sur d’autres concurrents comme l’Union européenne ou les États-Unis, également intéressés par les réserves minérales africaines. Pour contrer cette influence, Washington s’efforce d’ailleurs depuis quelques mois d’augmenter sa présence dans le secteur minier du continent, avec des investissements annoncés pour une usine de nickel de qualité batterie en Tanzanie, et le corridor de Lobito en Angola, destiné à favoriser l’exportation du cuivre et du cobalt en provenance de Zambie et de RDC.
Toujours en RDC, le président de la sous-commission Afrique de la Chambre des représentants américaine a présenté cette semaine un projet de loi en vue de mettre en place une stratégie nationale pour y sécuriser les chaines d’approvisionnement en minéraux stratégiques. Considérant la domination chinoise sur ces produits comme « une menace économique et de sécurité nationale », le membre du Congrès propose de la contrer.
Pour les États africains, cette concurrence féroce autour de leurs ressources est l’opportunité de négocier des contrats plus profitables, qui permettent notamment d’ajouter localement de la valeur aux minerais extraits. Des observateurs estiment aussi que cette ruée s’accompagne de risques de corruption et de dégradation des conditions environnementales et sociales dans les régions concernées par l’exploitation minière, et appellent donc à plus d’engagements en faveur de la transparence.
Emiliano Tossou
Source : Agence Ecofin